C’est dire que le verbe est un élément grammatical à double signification : d’une part, son signifié s’inscrit dans une évolution temporelle ; d’autre part, ce même signifié s’inscrit dans une situation de communication langagière, porteuse d’enjeux qui sont ceux du locuteur.

Si bien que le temps traduit par le verbe n’est jamais celui de l’événement évoqué, mais celui que le locuteur a décidé d’exprimer. D’où l’extrême complexité de ce qu’on appelle “la valeur des temps et des modes”, qui n’ont en fait rien à voir avec la distinction présent-passé-futur , même si celle-ci continue à être la première leçon sur le fonctionnement du verbe, régulièrement confondu avec l’action. C’est cette même erreur que l’on retrouve dans les affirmations selon lesquelles le passé simple traduirait des actions brèves, par opposition à l’imparfait, qui traduirait des actions qui durent, exemple : “Il marcha trente jours ; il marcha trente nuits ” (actions brèves s’il en est !).

En réalité tout est affaire d’énonciation, et la valeur d’aspect prime toujours la valeur temporelle.

Autre erreur : celle qui prétend que l’indicatif est le mode des actions certaines, tandis que le subjonctif serait celui des actions dont on doute. Exemple : “je ne crois pas qu’il pleuve aujourd’hui” (en fait, je suis certain que non, et pourtant c’est le subjonctif qui est employé !) <=> “je crois qu’il pleuvra aujourd’hui” (en fait, je n’en suis pas sûr du tout, et pourtant, c’est l’indicatif que l’on utilise ! .Moralité : pas de règle absolue ; et surtout ne pas confondre la notion de mode grammatical — qui n’est en fait qu’un “meuble de rangement”, une armoire dont les temps seraient les tiroirs — avec celle de modalité, laquelle appartient aux problèmes d’énonciation.

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