1- Ils forment le caractère

  À quoi servent les héros de la littérature jeunesse ? Selon Sylvie Vassallo, directrice du Salon du livre et de la presse jeunesse en Seine-Saint-Denis , [...] ces personnages "marquent l'entrée en lecture, au point que de longues années après, chacun sait citer ceux qui ont fait ses premières émotions. J'ai le sentiment que les miroirs, les réflexions et les aventures que les héros de fiction proposent aux enfants et aux jeunes accompagnent bien plus que nous ne l'imaginons la formation de leur caractère et travaillons sérieusement leur regard sur. le monde."

2- Ils ont valeur d'exemple

  Timothée de Fombelle, auteur de Tobie Loln ess, traduit dans une trentaine de langues (chez Gallimard Jeunesse), confie : "Cyrano est le meilleur exemple de ces héros qui m'ont fait grandir. Mon grand-père en a transmis le culte à toute ma famille." S'ils permettent à se construire, c'est aussi parce que ces personnages ont valeur d'exemple.

  "Qui ne s'est jamais demandé : « Que ferait mon héros dans cette situation-là ? » Un héros aide à faire des choix, il est notre double et notre altérité, et il permet de mieux nous connaître", remarque la romancière Charlotte Bousquet, auteur de Proie idéale (Éditions Rageot). Un point de vue partagé par Claire Carrier, psychiatre, qui insiste sur les vertus des héros de papier.

3- Ils émerveillent

  "Sur le papier, l'enfant peut revenir et retrouver ses héros quand il le veut, il peut en parler avec ses proches. Ils lui procurent une fenêtre sur l'extérieur, et surtout créent la surprise, éveillent sa curiosité, car ils arrivent toujours à leurs fins de manière inattendue. Or, dans la vie, on est en permanence à l'inattendu ! Par ailleurs, ils suscitent l'émerveillement. vivre."

4- Ils montrent le chemin

  Cet émerveillement, Jean-Philippe Arrou-Vignod, auteur de la série sympathique Enquête au collège (Folio Junior) et des délicieux "Rita et Machin", avec Olivier Tallec (Gallimard), l'évoque également. "Enfant, j'avais le sentiment que mes héros me ressemblaient. Ils s'appelaient Le Club des Cinq, Alice, Langelot, et plus tard Bob Morane. Dans la Bibliothèque verte et rose se côtoyaient des fictions et des récits de vie, comme Naufragé volontaire d'Alain Bombard. J'aime que la vie réelle et la fiction s'entremêlent ainsi. Je pouvais m'identifier et, à travers eux, faire des choses que je n'aurais jamais pu réaliser. impression que ce que j'étais n'était pas définitif, et que ces héros de fiction me montraient le chemin."

5- Ils offrent un spectacle

  Je vois des héros partout depuis mon enfance. Je confonds un peu la notion de héros avec celle de personnage. Pour moi, un héros, c'est quelqu'un qui a de la saveur, du caractère, qui m'offre un spectacle", explique aussi Emmanuel Guibert, à qui l'on doit Ariol , avec Marc Boutavant (Éditions Bayard).

  À rebours de tous ces auteurs nourris de souvenirs de leurs héros d'enfance, Hervé Tullet, dont le formidable Un jeu vient de sortir, assure n'en avoir pas eu dans sa jeunesse. Il propose d'ailleurs des ouvrages pleins de taches, de traits ou de points… et dépourvus de personnage

  "Les héros ne sont pas nécessaires. Je n'aime pas leur côté plan-plan, systématique. Le point de départ de mon travail est une révolte contre les héros. Ce qui m'intéresse, c'est l'idée ; je suis dans l'immédiateté. Le paradoxe, c'est qu'à force, avec la publication de tous ces livres, mes gribouillages, mes points sont devenus des héros !"

6- Ils enseignent le super-pouvoir des mots

  Difficile d'échapper aux héros, finalement! D'autant que lorsque l'on grandit et se plonge dans des livres sans image, on découvre, à travers les héros de papier, les "superpouvoirs" des mots… "Le verbe de Cyrano compte plus que son épée. Il se bat et remporter ses victoires avec sa poésie. C'est un héros très moderne parce que je crois que, de plus en plus, les mots feront la différence. Qui sont les héros du cours d'école ne paieraient pas de mine s'il ? n'avait pas cette répartie légendaire.

  Mes héros d'enfance et d'adolescence ont toujours un lien avec la force des mots. Cyrano, Rimbaud ou Achille Talon sont tous des magiciens des mots. Même le Grand Meaulnes, le plus taiseux de tous, devient un héros à l'instant où il se met à raconter sa fugue vers la fête étrange. D'ailleurs, j'ai fait de mon héros Vango un polyglotte prodigieux alors que je suis exactement le contraire !", confie Timothée de Fombelle.

7 – Ils donnent (parfois) envie d'écrire

  Au-delà de leurs aventures, c'est peut-être là que réside le véritable pouvoir de ces extraordinaires personnages : d'Alice à Zig et Puce, tous ces personnages phares de l'enfance dont on se souvient encore à l'âge adulte – et que l'on veut tant faire connaître à ses propres enfants – donner l'envie de découvrir le monde et d'avancer dans la vie. Ils sont même capables de susciter des vocations littéraires. "Au fond, on devient écrivain parce qu'on veut être un personnage romanesque…", explique Jean-Philippe Arrou-Vignod. Quant à Timothée de Fombelle, il en est conscient. "Si j'écris, c'est pour rejoindre mes héros."

Marie Auffret-Péricone

Profécoles